L’accès au logement au bénéfice de tous, ainsi que la réservation de foncier pour des espaces naturels et pour des usages communs, sont des composantes d’un développement durable . Sommes nous sur la bonne voie en Polynésie ?
On rappelera ici l'ODD n°11 de l'ONU pour la décennie à venir:
11.1 : assurer l’accès de tous à un logement et des services de base adéquats et sûrs, à un coût abordable... 11.7: assurer l’accès de tous à des espaces verts et des espaces publics sûrs.
La possibilité d'accéder au lagon et à la mer entre dans ce cadre, selon nous, et nécessite une vigilance permanente dans nos îles de Polynésie, du fait de nos particularités géographiques, sociales, économiques et culturelles
L'actualité de ces derniers mois autour de projets immobiliers, à Moorea notamment, a conduit notre fédération à analyser la situation de l'aménagement du foncier en Polynésie sous l'angle du développement durable.
Les aménagements immobiliers, eu égard à l'étroitesse de nos îles devraient, être considérés dans leur globalité, et non au cas par cas, dans leurs dimensions environnementales certes, mais également sous l'angle social à long terme (dans le but de satisfaire en premier lieu les besoins en foncier et en logement des polynésiens et d'éviter les fractures sociales) et non uniquement sous un angle économique de court terme.
Si l’accès au logement de tous fait partie des objectifs du Pays, il nous parait urgent de passer des intentions aux actes car force est de constater que le niveau des prix de l’immobilier, à Tahiti et à Moorea notamment, en location ou en achat, est désormais totalement déconnecté du niveau moyen de revenus des polynésiens et que les projets des promoteurs immobiliers semblent se poursuivre dans une mauvaise direction.
La multiplication de projets conséquents de résidences de luxe à Moorea (7 projets répertoriés pour plus de 400 résidences haut de gamme), à des prix hors de portée des résidents de l'île, en est une preuve. L' urbanisation massive, l'approvisionnement en eau, le dimensionnement des services publics en conséquence... et autres inconvénients soulevés par l'afflux de nouveaux résidents sont parmi les préoccupations des habitants,originaires de l'île, alors qu'eux mêmes éprouvent des difficultés dans leur installation ou dans leurs conditions de vie.
Tahiti n'est pas en reste puisqu'il y est pratiquement impossible aux classes moyennes de devenir propriétaires sauf à s'éloigner de plus en plus des centres urbains et que les classes modestes trouvent encore moins à se loger, y compris en habitat social.
Quant à l'accès à la mer des communautés locales , il se restreint à vue d'oeil dans les îles les plus habitées comme Tahiti mais aussi Moorea.
Les plages publiques se font rares et les étroites bandes côtières, à priori inconstructibles, qui offraient des possibilités d'accès au lagon, sont désormais clôturées par les propriétaires (pour des remblais futurs ?) , notamment sur la côte Est de Tahiti, mais également tout autour de l'île de Moorea et dans d'autres îles.
La belle plage de Temae traditionnellement fréquenté par les résidents et les visiteurs de Moorea fait l'objet de nombreux questionnements dans l'opinion publique quant à sa possible privatisation, suite au projet de vente à un groupe hôtelier. Pourtant, une préemption publique avait été envisagée et inscrite au PGA de la commune.
Crédit photo : Moorea temae plage
Une politique publique d’acquisition foncière, comme celle du Conservatoire du littoral, pourrait garantir l'accès à la mer pour tous, tout en préservant les littoraux de l’urbanisation, favorisant ainsi l'intégrité des paysages et la biodiversité.
Par ailleurs, des "Zones de Développement Prioritaire" pourraient être décrétées par le Pays en offrant la possibilité à certains aménagements de grande ampleur,de déroger aux PGA et aux PGEM des communes,dont les règles ont pourtant été définies, parfois laborieusement avec la population, dans un souci d'équilibre dans les différents usages des espaces et la protection de certains d'entre eux.
Notre fédération a souhaité alerter les institutions locales pour mettre en pratique une vraie stratégie d'aménagement durable qui permettrait, outre la préservation de l’environnement et d'espaces en littoral et en vallées, de réserver ou d'affecter du foncier aux besoins en logement des communautés résidentes. Cela suppose notamment de prêter une vigilance accrue aux nouveaux projets d'urbanisation et de mieux encadrer le secteur immobilier.
Il y va de la perpétuation du bien-être dans nos îles où régnent mixité communautaire, forte tradition culturelle et superbe cadre naturel.
Lire notre correspondance ci-dessous :
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